Côte d’Ivoire/ Concession de zones industrielles : Tout sur une prédation économique en préparation

La Côte d’Ivoire va-t-elle subir le même sort que le Tchad ? Le président Alassane Ouattara et son Premier Ministre Patrick Achi devront examiner avec la plus grande attention le projet de décret (en élaboration) portant création de guichets uniques dans des zones industrielles devant être gérées par un privé.

Disparition programmée de la SOGEDI

Le projet de création d'un guichet unique national concédé a un privé, qui sera probablement introduit prochainement en conseil des ministres par le ministre du Commerce, de l'Industrie et du Développement des PME, suscite beaucoup d’interrogations. La Diplomatique d’Abidjan (LDA, www.ladiplomatiquedabidjan.net) plantait récemment le décor autour de cette affaire dans un article, promettant d’y revenir plus en détail.

En effet, la Société de gestion et de développement des infrastructures industrielles (SOGEDI), société d'État créée en mars 2022, est dotée de prérogatives pour conduire la politique de développement des infrastructures industrielles.

Cette structure, encore récente, rencontrerait des difficultés à collecter les ressources financières nécessaires pour mettre en œuvre ses prérogatives. Si bien qu’on est porté à s’interroger sur la pertinence même de la création de guichets uniques pour des zones industrielles qui devraient être pilotés par des concessionnaires alors que la SOGEDI prévoyait déjà de se doter d’un guichet unique.

Pour des observateurs avertis de l’écosystème économique du pays, l’on s’achemine vers une paralysie stratégique certaine de cette société d’Etat. Un sabotage qui ne dit pas son nom...

Mécontentements et indignations… crise

De leur côté, certains industriels locaux qui se considèrent comme des précurseurs de l'industrialisation en Côte d'Ivoire se disent exclus de ce projet au profit de groupes multinationaux.

Mécontents de cette situation, ils craignent un accaparement du patrimoine industriel ivoirien avec des présomptions de corruption et de pots-de-vin impliquant de hauts fonctionnaires.

Le projet de décret (en élaboration) portant création des guichets uniques des zones économiques industrielles à Abidjan- PK24 Akoupé-Zeudji, Ferkessédougou et au parc industriel sis à San Pedro, est considéré par beaucoup comme un scandale emblématique. De la prédation économique bien orchestrée au profit du groupe d'ARISE Ivoire, probable bénéficiaire dudit décret.

Succursale ivoirienne de la multinationale Arise IIP fondée par l’agroalimentaire Olam - qui dit s’être entièrement retiré du capital d’ARISE IIP depuis janvier 2023, Arise Ivoire est déjà bénéficiaire depuis août 2022 d’une zone économique industrielle (ZEI) de 444 hectares à la zone industrielle d’Abidjan PK24. Sur cette parcelle, Arise Ivoire était censé développer en deux phases de 24 mois chacune, cette ZEI pour un montant de plus de 107 milliards de Fcfa, afin de mettre à la disposition des opérateurs économiques des lots industriels, des espaces commerciaux et résidentiels, des équipements et bâtiments dans une zone dotée d’infrastructures modernes de qualité et conformes aux standards internationaux.

Il était certes prévu la création d’un guichet unique pour faciliter les démarches administratives des potentiels opérateurs économiques intéressés par cette zone. Mais le projet de décret en élaboration dont copie a été consultée par LDA, dépouille presque totalement la SOGEDI de toute sa substance.

Une totale remise en cause des politiques économiques du président Alassane Ouattara. Entrisme ou sabotage ? En tout état de cause, la vision du chef de l’Etat fait aujourd'hui l'objet d'attaques extérieures avec des soutiens non négligeables au niveau interne sous la houlette d’Arise Ivoire.

ARISE IVOIRE, le cheval de Troie

A la manœuvre dans cette affaire, des proches collaborateurs du ministre en charge de l'Industrie, le Comité national de pilotage des partenariats public-privé (CNP-PPP), impliqué à un haut niveau (Nous y reviendrons). Pourtant Arise IIP, maison mère d’Arise Ivoire ne jouit guère d’une bonne réputation en la matière.  Dans un pays comme le Tchad, cette entreprise bénéficiant des mêmes avantages que ceux à elle accordés en Côte d’Ivoire, n’a laissé qu’une amère expérience aux autorités et certaines populations de ce pays d’Afrique centrale.

Il est donc essentiel de réaffirmer les limites et le rôle de l'État dans ce contexte. L'objectif étant de prévenir tout accaparement du secteur industriel par des intérêts privés étrangers au détriment des industriels locaux et même de l’Etat. La protection de l'écosystème industriel ivoirien et la lutte contre la corruption doivent être des priorités pour garantir le développement économique équilibré du pays.

Ainsi, est-il primordial d'évaluer attentivement les conséquences de la mise en place d'un guichet unique national concédé et géré par un privé sur des zones industrielles en Côte d'Ivoire. D’ailleurs, des spécialistes proposent d’abandonner ce type de projet et laisser la SOGEDI faire le travail pour lequel elle a été créée.

Mais au-delà de tout, il faut donner un sens à la signature du décret présidentiel. C’est pourquoi, le président Alassane Ouattara devra en appui des services de renseignements, urgemment activer le Conseil national de politique économique (CNPE) chargé d'identifier les grands défis économiques nationaux et internationaux auxquels l'État doit faire face. Mais aussi d'assurer la cohérence globale à moyen et long terme entre les politiques économiques et les programmes gouvernementaux.

Le CNPE devrait également renforcer les activités d'intelligence économique en collectant et maîtrisant en temps réel toutes les informations critiques nécessaires à la prise de décisions. Il contribuera à améliorer la qualité et l'efficacité de la gouvernance dans les domaines économique, social et environnemental. Le CNPE n’a pas eu connaissance de l’entrisme économique pratiqué par Arise Ivoire qui met en mal la cohésion sociale et la tranquillité du biotope industriel par la seule faute de hauts fonctionnaires qui ne privilégieraient que leur intérêt personnel.

Dans un contexte de compétition économique mondiale de plus en plus féroce, l'utilisation de l'information et de la connaissance deviennent essentielles pour déstabiliser la concurrence ou les Etats.

Les nouvelles formes d'agression telles que la désinformation, les rumeurs et les manipulations médiatiques, le leurre menacent tant les entreprises que les États à l'ère des réseaux de communication mondiaux et du travail en temps réel. La Côte d'Ivoire n'est pas épargnée par cette problématique. Le cas PETROCI est encore récent. Il est là pour nous démontrer que cela doit donner à réfléchir.

MC

Auteur:
LDA Journaliste

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