La CEDEAO (créée le 28 mai 1975 à Lagos-Nigeria) a pour objectif de promouvoir la coopération et l'intégration dans la perspective d'une Union économique de l'Afrique de l'Ouest, en vue d'élever le niveau de vie des peuples, de maintenir la stabilité, de renforcer les relations entre les États membres et de contribuer au progrès et au développement du continent africain. Malheureusement, ces dernières années, l’organisation fait l’objet de plusieurs critiques et pourrait enregistrer, dans l’histoire, le retrait de trois pays membres, à savoir le Mali, le Burkina Faso et le Niger. A l'occasion de sa 5ème édition de le " Club Prospective du CEP", le Centre d'Études Prospectives (CEP) s’est intéressé à la question. En plaçant cette rencontre sous la thématique "Retrait du Mali, du Burkina Faso et du Niger de la CEDEAO : quelles conséquences politiques, économiques et humanitaires pour les États de l'AES et de la CEDEAO ?, le CEP avait pour objectif d'appréhender les enjeux du retrait du Mali, du Burkina Faso et du Niger de la CEDEAO et de formuler des propositions.
Président du conseil d’administration du CEP, le ministre Sidi Tiémoko Touré du ministère des Ressources Animales et Halieutiques, a indiqué que cette question n'est pas seulement d'actualité, mais vitale pour l'avenir de l’intégration régionale et du développement commun de la région. Pour Sidi Touré, si la décision est actée elle peut naturellement engendrer de graves conséquences sur la CEDEAO, ses États membres et ceux de l'Alliance des États du Sahel. Le ministre ivoirien des Ressources Animales et Halieutiques estime que la situation exige donc une compréhension aiguisée mais aussi une anticipation proactive. « (…) nous voulons produire en commun des idées et accompagner les décideurs, en offrant des analyses pour faire face à la crise dans la CEDEAO », a-t-il confié, insistant sur la nécessité pour notre pays de rester résilient pour faire face à un éventuel retrait des trois pays.
La Représentante résidente de la CEDEAO en Côte d'Ivoire, Mme Fanta Cissé, quant à elle, a invité l’Alliance AES à ne pas prendre la décision extrême de sortir de la CEDEAO, car c’est plus avantageux pour celle-ci de rester au sein de la communauté.
Magloire N’Dehi, chef de bureau de la Fondation Friedrich Naumann, a indiqué soutenir l’initiative pour favoriser un dialogue ouvert et éclairé, qui aide à construire des institutions fortes et résilientes capables d’anticiper l’avenir et faire face aux défis. « Nous sommes fiers et convaincus que notre engagement commun envers la réflexion stratégique et la collaboration intersectorielle sera le ferment de changement positifs et durables. (…) Nous devons ensemble tirer leçon du passé, bien analyser le présent pour anticiper le futur de la Côte d’Ivoire dans une région désormais tumultueuse. », a ajouté M. N’Dehi.
Le retrait de l'Alliance des États du Sahel (AES) de la CEDEAO peut avoir des inconvénients au plan géopolitique, économique, énergétique diplomatique et sécuritaire importants sur l’instance régionale, ses États membres et ceux de l'Alliance de l’AES, ont soutenu les deux panélistes Dr Sylvain N’Guessan, expert en géopolitique et Pr Lambert N’galadjo Bamba, expert économique. Ils ont donné leur avis sur le sujet à travers les sous- thématiques «Les enjeux géopolitiques, économiques et sécuritaires du retrait du Mali du Burkina Faso et du Niger de la CEDEAO pour les États de l’AES et la CEDEAO » et « les défis et perspectives économiques pour la Côte d’Ivoire sans le Mali, le Burkina Faso et le Niger dans l’espace CEDEAO ». Pour les deux experts, l’Alliance AES a beaucoup à perdre, surtout que ses États dépendent énormément de l’extérieur. En termes d’importation, en effet, ce sont 55% pour le Burkina-Faso, 50,2% ( Mali) et 27 % ( Niger). Au niveau des richesses économiques, ils ne représentent que 6,9 % sur l’espace CEDEAO. Et 28,4% sur l’espace UEMOA. Leur poids en termes de commerce intra-communautaire est de 21,3% correspondant à 41,3% d’importation et 9,7 % d’exportation. Dans l’espace UEMOA, leur importation est estimée à 69,8 % du commerce intra régional contre 18,1% d’exportation. L’AES, c’est également 54% en superficie et 71,5 millions d’habitants (0ndlr chiffre de 2022). Pour Sylvain N’Guessan, la Côte d’Ivoire doit parer à toute éventualité de retrait de ces États, en finalisant le port sec de Ferkessédougou, tendre vers l’autosuffisance alimentaire et envisager un chemin de fer Bouaké-Bamako. Pr Lambert N’galadjo Bamba a abondé dans le même sens que son prédécesseur, tout en insistant sur le fait que les autorités du pays doivent poursuivre ce qu’elles savent faire le mieux pour la résilience de l’économie ivoirienne .
Notons que le Centre d'Études Prospectives est un think tank dédié à la promotion des politiques de développement en Afrique, visant à catalyser le développement durable et inclusif sur le continent. Le CEP fait la promotion de la prospective et la réflexion stratégique, tout en cherchant à influencer les débats nationaux et internationaux par la proposition de solutions innovantes.
Auteur: Daniel Coulibaly